
Dans le cadre du Projet «Appui
à la réconciliation des communautés burundaises à travers le traitement ouvert
du passé», la Commission Diocésaine Justice et Paix Bujumbura (CDJP Bujumbura),
avec l’appui financier de Misereor, a réuni, vendredi 5 septembre 2025, à la
paroisse Munanira, de nombreux bénéficiaires du projet venus pour livrer les
récits empreints d’espérance et de renouveau.
Porté par l’écoute, le
dialogue et le pardon, ce projet a déjà touché des centaines de personnes Ã
travers des groupes de parole, des moments d’évangélisation et des espaces
consacrés à la libération des mémoires. Cette journée s’est inscrite dans un
cadre de commémoration et de mémoire partagé.
Une démarche collective, un
cheminement personnel
Selon Madame Arlette Gateka,
chargée du projet, la CDJP Bujumbura a collaboré étroitement avec les Curés
afin d’identifier, au sein des communautés, des animateurs aptes à porter cette
initiative. Ces derniers ont ensuite suivi des sessions de formation centrées
sur la justice transitionnelle, ainsi que sur la compréhension et la gestion
des traumatismes post-conflits. L’objectif était de leur donner les moyens
d’agir comme relais et artisans de transformation sociale dans leurs milieux
respectifs.
À l’issue de ces formations,
les animateurs ont d’abord sensibilisé les leaders communautaires, sollicitant
leur appui actif dans la mise en œuvre du projet. Ils ont ensuite élargi leur
action par des campagnes de sensibilisation de masse, invitant la population Ã
rejoindre les groupes de parole créés pour l’occasion.

Parmi les nombreux
témoignages recueillis, trois voix se détachent, marquées à la fois par leur
sincérité et par leur portée symbolique.
Célestin Ngendakubwayo: «La
réconciliation est un processus»
Habitant de la commune de Kiganda,
Monsieur Célestin confie que «pardonner n’a rien de facile». Pour lui, il
s’agit avant tout d’un cheminement intérieur. Grâce aux groupes de dialogue, il
a pris conscience de ses blessures et amorcé un processus de guérison. «Une
libération intérieure profonde m’a transformé. Aujourd’hui, je crois que la
réconciliation est possible, même avec ceux qui nous ont fait du mal.»
Dans sa communauté, il
observe déjà des changements tangibles: la parole se libère, les langues se
délient, et l’écoute réciproque s’installe. À ceux qui hésitent encore Ã
franchir le pas, il conseille d’observer les fruits visibles chez les
participants.
Audace Nankwahafi: «le
pardon est une force»
Ancien responsable de la
Commission Justice et Paix de la Paroisse Munanira, Monsieur Audace est
aujourd’hui un animateur du Projet. Il affirme quant à lui que «le pardon est
une force». Il témoigne d’un impact profond chez les participants: «Les gens
ont compris qu’on ne peut pas remplacer la réconciliation par l’oubli. Le
pardon mutuel est une force qui libère et construit.»
Il souligne également
l’engagement précieux des autorités locales dès les premières étapes, une
implication déterminante pour favoriser l’adhésion de la population. Sa
recommandation est sans équivoque : il faut soutenir les groupes existants et
étendre le Projet à d’autres communautés.
Eusébie Nzeyimana: «Parler permet de guérir»
Mère de six enfants, Madame
Eusébie habite sur la colline Nyarunazi (Commune Kiganda). Elle exprime avec
émotion la dimension libératrice de son expérience: «Un jour, lors d’un
exercice, j’ai pleuré de façon incontrôlée. Ce n’était pas de la tristesse,
mais une délivrance. J’ai compris que certaines blessures, qu’on croyait
enfouies, doivent être exprimées pour guérir.»
Elle insiste sur
l’importance de cicatriser les blessures intérieures pour pouvoir accorder un
pardon véritable. Dans sa propre famille, elle a constaté une profonde
transformation : la confiance, la vérité et l’écoute mutuelle y trouvent
désormais leur place. Son appel est vibrant: «Ce projet m’a permis de décharger
mon cœur. Je souhaite de tout cœur qu’il continue, car la paix se construit
avec le temps, la patience et la vérité.»

Un projet porteur d’espoir
pour les communautés burundaises
Ces témoignages illustrent
la double dimension de la réconciliation personnelle et communautaire. Par la
vérité partagée, le dialogue ouvert et l’accompagnement spirituel, ce Projet
contribue à panser des blessures invisibles mais bien réelles dans les cœurs
des Burundais. Son succès repose sur l’engagement de toutes les parties
prenantes: animateurs formés, leaders religieux, autorités locales et
bénéficiaires eux-mêmes, devenus à leur tour des ambassadeurs de paix.
La réconciliation, on le
sait, n’est pas un acte ponctuel mais un chemin à parcourir jour après jour. Ce
Projet a ouvert une voie, mais beaucoup reste à faire pour étendre ses
bienfaits à d’autres collines, à d’autres Paroisses, à d’autres cœurs blessés.
Comme l’exprime avec
justesse l’un des bénéficiaires: «Le pardon ne se fait pas en un jour. Mais
avec Dieu, la parole et le dialogue, tout devient possible.»
Rénovat Niyonsenga