La Tradition de l'Église affirme que ceux qui sont au purgatoire bénéficient des prières et des supplications adressées en leur faveur à Dieu
En ce vendredi le 2 Novembre, les chrétiens du monde entier prient pour leurs défunts, mais aussi pour les âmes qui sont au purgatoire. En célébrant seuls, à plusieurs, en famille, prier pour les morts c'est poser un acte de foi par une brève liturgie autour de ceux qui nous ont quittés. Ainsi, ce jour-là , en association avec tous les saints connus ou inconnus, l'Église prie particulièrement pour tous les défunts dans l'espérance de la vie éternelle. Mais, qu'est-ce que purgatoire? Cette question suscite l'intérêt de savoir comment se traduit l'issue de l'homme à sa mort, son orientation entre le Ciel et l'enfer. L'HOMME APRÈS SA MORT: GRACE DIVINE OU JUSTICE DIVINE?
Il paraît plus juste de dire qu'avant de paraître devant Dieu, l'homme a besoin d'une purification. Pourquoi? Parce les Écritures saintes insistent sur la pureté du coeur nécessaire pour approcher Dieu. «Heureux les coeurs purs, ils verront Dieu» (Mat.5,8). Or, rares sont des personnes qui, à l'heure de la mort, sont purifiés au point de pouvoir s'immerger directement dans la sainteté de Dieu, alors que la mort n'est pas une éponge qui efface, comme par magie, tout le mal fait et le péché commis. Ce qui est sûr c'est que la grâce de Dieu - son secours gratuit -, qui sauve l'homme, n'exclut pas la justice, de sorte que tout ce qui s'est fait sur la terre finisse par avoir toujours la même valeur, d'où avec la mort, l'homme se retrouve devant un choix de vie définitif.
Ceux qui ont mené une vie très pure et qui meurent dans la grâce et l'amitié de Dieu, totalement purifiés, vont directement au Ciel. A l'inverse, il y a ceux qui sont morts en ayant commis des fautes très graves, sans s'être repentis et sans accueillir l'amour miséricordieux de Dieu. C'est cet état d'auto-exclusion définitive de la communion avec Dieu qu'on désigne par le mot «enfer». Toutefois, au plus profond de la plupart des hommes, il reste une ultime ouverture intérieure pour la vérité, pour l'amour, pour Dieu. Mais, dans les choix concrets de vie, cette ouverture à Dieu est recouverte depuis toujours de nouveaux compromis avec le mal - des saletés qui recouvrent la pureté, dont cependant la soif demeure, à tel point que même ceux qui s'efforcent de vivre en amitié avec Dieu présentent des inclinations déréglées, des failles dans leur constitution humaine, ou encore des caractéristiques incompatibles avec la sainteté de Dieu.
Alors, la question se pose: «Qu'advient-il à de tels individus lorsqu'ils comparaissent devant le Juge? Toutes les choses sales qu'ils ont accumulées dans leur vie deviendront-elles d'un coup insignifiantes?» (Lettre Encyclique Spe Salvi du pape Benoît XVI, (n.44). C'est donc une question de la justice qui se pose. Certainement que le mal du monde et de nos coeurs n'est pas purement et simplement oublié avec la mort; Dieu n'est pas seulement Grâce, il est également Justice, et toute personne douée de liberté est, en fin de compte, responsable de ses choix et de ses comportements. De par-là , l'enseignement de l'Eglise considère que le destin de l'être humain dans la mort n'atteint pas un point final statique de l'évolution. Autrement dit, il lui est possible de réaliser un chemin de perfectionnement - de conversion et de purification - après la mort. Donc, l'être humain, dans sa mort, a encore une possibilité d'atteindre le degré de sainteté nécessaire pour être dans la joie du Ciel. COMMENT, DANS SA MORT, L'HOMME ACQUIERT-IL LA SAINTETÉ ULTIME NÉCESSAIRE POUR ETRE DANS LA JOIE DU CIEL?
«C'est précisément dans la mort [...] que chaque personne expérimentera, avec une intensité comme jamais encore auparavant, le sens de sa vie vécue. Et en fonction de ce qu'elle aura fait durant cette vie, en fonction aussi de ce qu'elle aura fait à d'autres personnes et dans les situations historiques et structurelles de la vie ici-bas, son union à Dieu sera également liée à une purification vécue de manière plus ou moins douloureuse», affirme le théologien Reinold Bank dans son livre «Escatologia da Pessoa» (Escathologie de la personne).
Le purgatoire est fondamentalement un nouvel acte, réitéré, de salut de Dieu, afin que l'homme puisse être sauvé, une étape pour que la personne puisse atteindre sa plénitude, évoluer jusqu'aux possibilités ultimes de son être, exploiter pleinement toutes ses capacités, et devenir ainsi apte à entrer au Ciel et dans la sainteté de Dieu. Cette purification est une ultime chance offerte à l'homme de réaliser le dessein de Dieu, selon lequel nous sommes «prédestinés à reproduire l'image de son Fils, afin qu'il soit l'Aîné d'une multitude de frères » (Rm.8,29).
Le mot «Purgatoire» vient du latin «Purgare» qui se traduit par «purifier, nettoyer» - verbe qui a aussi donné le mot «purger» - ou encore du grec «pur», moyen de la purification. Si le concept de Purgatoire, en tant qu'épreuve de purification, est très ancien, le recours à ce mot est plus récent. La naissance du mot Purgatoire se fait conjointement à l'apparition progressive, au haut Moyen Âge, du concept de péché léger (peccata levia, ou péché véniel) des chrétiens morts s'être confessés auparavant, et pour qui l'Enfer est inapproprié.
Ceux qui meurent dans la grâce et l'amitié de Dieu, mais imparfaitement purifiés, c'est-à -dire avec des résistances à l'amour de Dieu, bien qu'assurés de leur salut éternel, connaissent après leur mort un temps de purification qui les libère complètement du mal. Ainsi ils obtiennent la sainteté nécessaire pour entrer dans le ciel. Il s'agit de l'ultime conversion de la personne. Devant Dieu, à l'heure de la mort, chacun doit abdiquer, de façon radicale, tout orgueil et égoïsme, et se donner inconditionnellement au Seigneur, plaçant en Lui toute son espérance. Ce que l'Eglise appelle purgatoire, c'est cet acte final de l'évolution humaine, cette ultime conversion et purification pour plonger dans la communion avec Dieu.
Bien que le mot de «purgatoire» soit absent de la Bible, quelques passages de l'Écriture suggéreraient l'existence d'un moyen de purification intervenant après la mort corporelle et l'existence d'un temps d'expiation entre la mort et le pardon des péchés. Le Livre des Maccabées (qui n'a pas été retenu par le protestantisme dans le canon biblique de 1534, mais qui est officiellement intégré au canon catholique lors du concile de Trente), parle d'un sacrifice accompli en faveur de défunts, ce qui laisse entendre l'existence d'un lieu de purification. Et c'est Paul de Tarse qui fit allusion le premier à un «feu», interprété comme le purgatoire, dans l'Épître aux Corinthiens.
La théologie contemporaine récente donne au purgatoire un sens d'un délai d'attente, d'une étape de purification. Il ne s'agit ni d'un lieu, ni d'un temps, mais plutôt d'un état. En tout cas, le purgatoire n'est pas à concevoir comme une punition, mais la communion avec Dieu, dans laquelle nous introduit la mort, nous fait prendre conscience douloureusement de nos imperfections et de nos refus d'aimer, et du besoin de nous laisser purifier par la puissance salvatrice du Christ. C'est Dieu lui-même qui purifie et transforme. Et la Tradition de l'Église affirme que ceux qui sont au purgatoire bénéficient des prières et des supplications adressées en leur faveur à Dieu par leurs frères, et aussi de l'intercession des saints déjà introduits dans la béatitude de la vision de Dieu. En ce sens, le purgatoire n'est plus à comprendre comme une troisième alternative de l'au-delà mais bien comme un instrument du salut.
Alors, en ce jours-ci consacrée à la prière pour les morts, et en communion avec les nôtres qui nous ont quittés, et surtout avec les âmes qui prient ardemment Dieu mais pour qui plus aucun parent ou ami ne prie sur terre, après un temps de silence, prions pour les confier, encore une fois, à la tendresse de Dieu.
Seigneur Jésus-Christ, avant de ressusciter, Tu as reposé trois jours en terre, et depuis ce jour-là , la tombe des hommes est devenue, pour les croyants, signe d'espérance en la Résurrection. Nous Te prions, Toi qui es la Résurrection et la Vie: donne aux morts de reposer en paix dans leurs tombeaux jusqu'au jour où Tu les réveilleras, pour qu'ils voient, de leurs yeux, dans la clarté de Ta face, la lumière sans déclin; Toi qui règnes pour les siècles des siècles. Amen!
Michel NIBITANGA, CEDICOM